Je vous présente une nouvelle création Borothé 1 , réalisée à partir de textiles de réemploi (chutes de tissus de coton, lin, laine), de fils et tissus teints à l’indigo naturel (matériaux résiduels qui restent après avoir pratiqué le shibori, teinture en réserve avec motif réalisé par nouage, pliage, pressage ou couture). Les différentes pièces textiles ont été teintées avec un mélange de feuilles de thés.
Les feuilles de thés « grands crus » chinois et taïwanais principalement mais aussi japonais (tie guan yin, mi lan xiang, pu er, tai ping hou kui, hojicha, etc.) ont d’abord été infusées un grand nombre de fois pour être consommées en boisson puis, une fois séchées, ont servi à la teinture des textiles.
Les différentes nuances ont été obtenues par différents bains et un nuançage au fer. Une fois les feuilles à nouveau séchées, elles ont servi au rembourrage de cette création (souvenir lointain d’une époque où les impératrices chinoises dormaient sur des coussins de thé car, parait-il, cela évitait les migraines).
Création issue de matières résiduelles que je ne peux me résoudre à abandonner comme de simples déchets…
D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours récupéré des emballages (papiers, boites, rubans, cordons, etc.), des morceaux de bois morts, des boutons, des végétaux, des objets cassés, etc. Ce n’était pas un acte compulsif (point de syndrome de Diogène à l’horizon) mais un geste réfléchi avec une idée de sélection selon des critères esthétiques personnels.
L’usure des objets, la marque du temps qui raconte une histoire me touchaient également. Le concept esthétique japonais de wabi-sabi (sobriété, simplicité, asymétrie ainsi que marque du temps et d’usure sur les choses) que je découvris lors de ma pratique de la cérémonie du thé japonaise me parla immédiatement.
Plus tard, le furoshiki, la teinture végétale et le shibori m’amenèrent au boro dont je m’inspire ici.
Le boro, « lambeaux, haillons » en japonais, est composé de textiles rapiécés avec des restes de vêtements, rideaux, housses de futon, etc. Cette technique permettait aux paysans japonais peu argentés de prolonger la vie des cotons et éviter le gaspillage. Transmis de génération en génération, ces textiles, enrichis au fur et à mesure de nouvelles pièces liées à des histoires familiales fortes, appliquent ce concept esthétique de wabi-sabi.
Lors de ses congés d’été, L’Atelier du Furoshiki en a profité pour découvrir Le champ des couleurs basé à La Roque d’Anthéron.
Amandine et Laura ont repris l’exploitation familiale de maraichage pour développer la culture de la Persicaire (Persicaria Tinctoria), connue aussi sous le nom de Renouée des Teinturiers (Polygonum tinctorium Aiton) en agriculture biologique.
Cette plante originaire d’Asie (ici, provenant de graines de l’Ile de Sapporo, Japon) est une plante tinctoriale avec laquelle on extrait de l’Indigo sous forme de pigments produisant de magnifiques bleus.
Ces deux sœurs, passionnées d’indigo, se sont formées auprès de Michel Garcia, l’un des initiateurs du renouveau de la teinture végétale en France.
Depuis 2017, elles font un travail formidable au sein de leur exploitation. Le rythme est très intense de la récolte à la transformation en pigments !
La persicaire est récoltée 2 à 3 fois dans l’été. Les feuilles sont ensuite infusées puis le mélange est oxygéné avec un apport de chaux ou argile. La pâte pigmentaire qui en résulte est nettoyée, séchée au four solaire puis broyée pour obtenir le pigment bleu qui servira à la teinture textile, à la savonnerie, etc. La fleurée (mousse bleue qui apparait au-dessus du mélange oxygéné) prélevée et séchée sera réduite en pigments destinés principalement pour les Beaux-arts.
Voici une petite vidéo de la production 2018 réalisée par Le Champ des couleurs :
Les filles cultivent également la Garance et le Réséda qui seront bientôt disponibles à la vente.
L’hiver, période plus calme pour les cultures, Amandine et Laura teignent avec leur indigo et proposent de belles créations textiles.
Si vous avez envie de découvrir leur travail et tester leur indigo, n’hésitez pas à les contacter, l’accueil est très chaleureux : https://www.facebook.com/lechampdescouleurs/ ou http://lechampdescouleurs.com/