Série Boro – sans titre
Réemploi de chutes de coton et de soie, fils de coton utilisés pour un précédent shibori*, teinture naturelle aux peaux et aux noyaux d’avocats (reliefs de repas), laine de mouton (récupérée lors d’une tonte d’été, lavée et cardée), coquillages (morceaux d’huitres polies), capsule du fruit du paulownia** tombée au sol, papier d’exercices de calligraphie japonaise et encre de Chine…
Tous ces matériaux, usés, marqués par le passage du temps, considérés par la plupart comme des rebus, je les assemble, je les couds, je les répare et me nourris de leurs histoires, je mets en lumière leurs marques, m’inspirant du wabi-sabi*** japonais.
Ainsi, j’ai créé ce furoshiki pour apprivoiser l’imparfait du corps, le rugueux, la boursouflure, le noueux, le douloureux, mais aussi le lisse, le mou, le doux, le chaud, l’ouverture, le féminin, le mélange végétal-animal, terre et d’eau.
Une fois noué, il sert de réceptacle à un assemblage de petits papiers où j’ai posé le nom de femmes que j’ai liées par le fil de mon histoire, liées de près ou de loin, dans le temps ou l’espace, simple connaissance, amies, sœur, mères, sans exhaustivité. Hommage simple à ces femmes uniques, courageuses, belles et imparfaites.
*le shibori est une technique japonaise de teinture en réserve avec motif réalisé par nouage, pliage, pressage ou couture.
**la capsule du fruit du paulownia, arbre originaire de Chine et de Corée, s’ouvre à maturité pour en laisser échapper les graines. En Chine, le paulownia est associé au phœnix et à l’Impératrice. On dit que c’est le seul arbre où le phœnix peut se poser sans enflammer son feuillage. Dans certaines provinces chinoises, la tradition voulait qu’on plante un paulownia à la naissance de chaque fille. Lorsqu’elle était en âge de se marier, l’arbre était abattu pour servir de dot et être transformer en mobilier. Au Japon, on utilise son bois pour fabriquer des coffres où l’on range les kimonos.
*** le wabi-sabi est un concept esthétique japonais qui allie sobriété, simplicité, asymétrie ainsi que marque du temps et d’usure sur les choses.
2ème création de la série Borothé (voir article précédent).
Borothé 2 est composée principalement de chutes de soie, de fil de soie teints au thés et de chutes de soie teinte à l’indigo ainsi que de coquillages (restes de patelles et huîtres plates). Le nouage renferme une théière brisée qui a longtemps servi à l’infusion des thés utilisés, après consommation, pour cette teinture.
Je vous présente une nouvelle création Borothé 1 , réalisée à partir de textiles de réemploi (chutes de tissus de coton, lin, laine), de fils et tissus teints à l’indigo naturel (matériaux résiduels qui restent après avoir pratiqué le shibori, teinture en réserve avec motif réalisé par nouage, pliage, pressage ou couture). Les différentes pièces textiles ont été teintées avec un mélange de feuilles de thés.
Les feuilles de thés « grands crus » chinois et taïwanais principalement mais aussi japonais (tie guan yin, mi lan xiang, pu er, tai ping hou kui, hojicha, etc.) ont d’abord été infusées un grand nombre de fois pour être consommées en boisson puis, une fois séchées, ont servi à la teinture des textiles.
Les différentes nuances ont été obtenues par différents bains et un nuançage au fer. Une fois les feuilles à nouveau séchées, elles ont servi au rembourrage de cette création (souvenir lointain d’une époque où les impératrices chinoises dormaient sur des coussins de thé car, parait-il, cela évitait les migraines).
Création issue de matières résiduelles que je ne peux me résoudre à abandonner comme de simples déchets…
D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours récupéré des emballages (papiers, boites, rubans, cordons, etc.), des morceaux de bois morts, des boutons, des végétaux, des objets cassés, etc. Ce n’était pas un acte compulsif (point de syndrome de Diogène à l’horizon) mais un geste réfléchi avec une idée de sélection selon des critères esthétiques personnels.
L’usure des objets, la marque du temps qui raconte une histoire me touchaient également. Le concept esthétique japonais de wabi-sabi (sobriété, simplicité, asymétrie ainsi que marque du temps et d’usure sur les choses) que je découvris lors de ma pratique de la cérémonie du thé japonaise me parla immédiatement.
Plus tard, le furoshiki, la teinture végétale et le shibori m’amenèrent au boro dont je m’inspire ici.
Le boro, « lambeaux, haillons » en japonais, est composé de textiles rapiécés avec des restes de vêtements, rideaux, housses de futon, etc. Cette technique permettait aux paysans japonais peu argentés de prolonger la vie des cotons et éviter le gaspillage. Transmis de génération en génération, ces textiles, enrichis au fur et à mesure de nouvelles pièces liées à des histoires familiales fortes, appliquent ce concept esthétique de wabi-sabi.
Après 6 mois de travail, le jour de la projection des 2 courts-métrages a enfin sonné! Ce mardi 25 juin 2013, les élèves de 5ème2 du Collège du Breil, impliqués dans le projet « Les déchets nous assènent, le furoshiki entre en scène! » ont eu le plaisir de montrer deux créations à leurs familles, amis, collégiens et professeurs.
Furoshiki, un vrai tour de passe-passe et Dans la famille furoshiki, je voudrais… ont été accueilli chaleureusement par le public. Dès aujourd’hui,vous pouvez les visionner et les partager avec votre entourage afin que cette expérience puisse se prolonger et montrer que chacun, même les enfants, peut agir à sa façon et avec ses moyens pour la réduction des déchets à la source.
Les courts-métrages sont disponibles avec sous-titres en anglais, japonais, portugais, français pour sourds et malentendants, afin de les faire voyager plus loin.
Les trois dernières séances ont été très intenses pour les élèves de 5ème2. Les répétitions se sont enchainées et la caméra a fait son apparition. Sadou, Oni (les futurs cameramen), Inaya et Antony (les preneurs de sons) ont commencé à travailler sur la technique (apprentissage du matériel son et vidéo, choix des plans, éclairage, prise de son).
Les conditions de tournage se sont donc mises en place pour tous les élèves (acteurs, techniciens) qui ont dû apprivoiser la caméra. Il a fallu penser aux décors, aux accessoires, aux costumes (faire attention à ne pas montrer des marques publicitaires, ce qui n’est pas toujours facile pour des collégiens déjà très engagés dans la consommation), travailler l’expression corporelle, le placement de la voix, et le silence…
Après des vacances scolaires bien méritées pour digérer tout cela, les élèves se sont remis dans le bain en visionnant quelques rushs afin de pouvoir analyser tout ce qui avait été fait auparavant et améliorer leur jeu d’acteur, la mise en scène et la réalisation. Pendant que le plus gros du groupe répétait les deux scenarii, le tournage de quelques scènes a déjà commencé car le temps est compté et la fin du projet approche.